Formation Désenfumage

Réglementation applicable à la conception des systèmes de désenfumage

La conception des systèmes de désenfumage est régie par un ensemble de textes réglementaires et normatifs destinés à garantir la sécurité des personnes et des bâtiments en cas d’incendie. Ces dispositions visent à assurer l’évacuation rapide des fumées toxiques et des gaz chauds, à maintenir la visibilité dans les circulations, à faciliter l’évacuation des occupants et à permettre l’intervention des secours dans des conditions maîtrisées.

Plusieurs textes réglementaires définissent les obligations selon la nature et l’usage du bâtiment :

• Le Code de la construction et de l’habitation (CCH) constitue le socle réglementaire général pour la sécurité incendie dans les bâtiments neufs et existants.
• L’arrêté du 25 juin 1980, modifié, relatif à la sécurité contre l’incendie dans les établissements recevant du public (ERP), fixe les règles applicables au désenfumage selon le type et la catégorie d’ERP.
• L’arrêté du 30 décembre 2011 encadre les règles spécifiques applicables aux immeubles de grande hauteur (IGH), avec des exigences renforcées en matière de désenfumage mécanique.
• L’arrêté du 31 janvier 1986, relatif à la protection contre l’incendie dans les bâtiments d’habitation, impose des dispositifs de désenfumage dans les circulations communes.
• Pour les bâtiments à usage industriel ou relevant du régime des ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement), les exigences sont fixées par le Code du travail et les arrêtés ministériels spécifiques.

La conception des dispositifs de désenfumage doit également être coordonnée avec le système de sécurité incendie (SSI) du bâtiment, notamment les systèmes de détection automatique d’incendie, les compartimentages et les dispositifs de mise en sécurité. Elle fait l’objet de vérifications par les bureaux de contrôle et les commissions de sécurité, notamment lors du dépôt du dossier de sécurité et avant l’ouverture au public.

Typologie des systèmes de désenfumage : naturel, mécanique ou mixte

La réglementation distingue plusieurs types de systèmes de désenfumage, à choisir et concevoir en fonction des caractéristiques du bâtiment, de sa destination, de sa hauteur, et des risques liés à son exploitation. Chacun repose sur un principe physique différent, mais tous doivent répondre aux mêmes finalités : évacuer efficacement les fumées en cas d’incendie, protéger les personnes et limiter la propagation du feu.

Le désenfumage naturel

Le désenfumage naturel fonctionne par différentiel de pression et effet thermique, en utilisant le principe de l’air chaud qui s’élève naturellement. Il repose sur deux éléments principaux :

• Des amenées d’air frais situées en partie basse (façade, portes à jalousies, grilles)
• Des ouvrants d’évacuation placés en partie haute, comme des exutoires de fumée (lanternaux), des trappes ou des fenêtres motorisées

Ce système est particulièrement adapté aux circulations horizontales, cages d’escaliers, halls et locaux à volume important. Il est largement utilisé dans les ERP, les bâtiments tertiaires et les habitations collectives, sous réserve de respecter les surfaces libres d’évacuation exigées et les conditions d’implantation fixées par la réglementation.

Le désenfumage mécanique

Le désenfumage mécanique consiste à extraire les fumées via des ventilateurs reliés à un réseau de conduits. Il est utilisé lorsqu’un désenfumage naturel est techniquement impossible ou insuffisant (absence d’ouvrants, grande hauteur, locaux aveugles…).

Il comprend :

• Des extracteurs motorisés (souvent asservis au SSI)
• Des volets de désenfumage commandés électriquement
• Des conduits résistants au feu pour évacuer les fumées à l’extérieur

Ce type de système est obligatoire dans les IGH et recommandé dans les bâtiments à compartimentage complexe. Il offre une grande maîtrise des débits et permet de gérer des scénarios multi-zones.

Les systèmes hybrides ou spécifiques

Dans les bâtiments présentant des contraintes particulières, il est fréquent d’associer plusieurs technologies :

• Systèmes combinés naturel/mécanique pour optimiser les performances
• Désenfumage par balayage (flux traversant) pour certains parkings ou ateliers
• Dispositifs spécifiques pour les locaux techniques, ascenseurs, ou cages d’escaliers encloisonnées

Chaque système doit être conçu en cohérence avec l’architecture du bâtiment, les zones de compartimentage et les autres installations de sécurité. Le choix du type de désenfumage ne relève jamais d’un simple critère de coût, mais d’une analyse technique précise réalisée dès la phase de conception.

Normes techniques applicables à la conception des systèmes de désenfumage

Au-delà des textes réglementaires, la conception des dispositifs de désenfumage est encadrée par un ensemble de normes techniques, françaises et européennes, qui garantissent leur fiabilité, leur performance et leur compatibilité avec les autres éléments du système de sécurité incendie. Ces normes s’appliquent aussi bien aux composants qu’à l’ensemble du système.

Normes françaises (NF)

Les normes de la série NF S 61-XXX encadrent l’ensemble des éléments constitutifs d’un système de désenfumage. Parmi les plus couramment mobilisées :

• NF S 61-932 : dispositifs de commande manuelle ou automatique de désenfumage
• NF S 61-933 : exutoires de fumée et de chaleur
• NF S 61-937 : volets de désenfumage
• NF S 61-938 : centrales de désenfumage naturel
• NF S 61-939 : exigences de fiabilité et conditions d’essai

Ces normes précisent les exigences de fonctionnement, les résistances au feu, les procédures de test, les conditions d’installation, ainsi que les obligations de maintenance ou de vérification.

Normes européennes (EN 12101)

La série EN 12101, largement utilisée en complément ou en remplacement des normes nationales, apporte un cadre harmonisé au niveau européen. Elle est subdivisée en plusieurs parties, chacune dédiée à un composant ou à une fonction spécifique :

• EN 12101-2 : exutoires pour désenfumage naturel
• EN 12101-3 : ventilateurs pour désenfumage mécanique
• EN 12101-6 : conduits de désenfumage
• EN 12101-7 : clapets et volets
• EN 12101-9 : systèmes de commande et de contrôle

L’application de ces normes est fortement recommandée, notamment dans les marchés publics ou les bâtiments complexes. Dans certains cas, leur respect conditionne la recevabilité du projet en commission de sécurité.

Articulation avec les autres normes incendie

La conception d’un système de désenfumage ne peut être envisagée isolément. Elle doit être pensée en lien étroit avec :

• les normes relatives au SSI (système de sécurité incendie) ;
• les exigences de compartimentage (coupe-feu, pare-flamme) ;
• les règles d’évacuation des personnes (normes d’accessibilité, éclairage de sécurité) ;
• les dispositifs de détection automatique d’incendie et leurs temporisations.

L’ensemble constitue un écosystème normatif interdépendant, où chaque élément impacte les performances globales du bâtiment en situation d’urgence.

Enjeux techniques liés à la conception des systèmes de désenfumage

La phase de conception d’un système de désenfumage est déterminante. Elle conditionne non seulement la conformité réglementaire du bâtiment, mais aussi sa capacité réelle à protéger les personnes et les biens en cas d’incendie. Cette étape mobilise des compétences techniques spécifiques et une compréhension fine des interactions entre le désenfumage et les autres dispositifs de sécurité incendie.

Dimensionnement : une étape stratégique

Le dimensionnement du système repose sur plusieurs paramètres clés :

• Surface utile d’évacuation des fumées, calculée en fonction de la surface à protéger et du type d’activité ;
• Débits d’extraction pour les systèmes mécaniques (exprimés en m³/h) ;
• Hauteur sous plafond, volume du local, nature des matériaux combustibles, configuration du compartimentage ;
• Taux de renouvellement d’air, essentiel pour maintenir la stratification des fumées.

Ces calculs doivent être justifiés dans le dossier de sécurité et peuvent faire l’objet d’une vérification par un bureau de contrôle ou une commission de sécurité.

Implantation et configuration

Le choix des emplacements d’exutoires, de conduits ou de ventilateurs est déterminé par la morphologie du bâtiment :

• Pour le désenfumage naturel : la disposition en point haut, la répartition homogène des ouvrants et l’équilibre avec les amenées d’air en partie basse sont indispensables.
• Pour le désenfumage mécanique : la sectorisation, les volets de commande, les conduits résistants au feu et les ventilateurs à débit garanti doivent être pensés pour répondre aux scénarios d’incendie les plus défavorables.

Une implantation inadaptée ou un dimensionnement approximatif peut compromettre l’efficacité globale du dispositif, voire entraîner son dysfonctionnement.

Justifications attendues dans le dossier technique

Le concepteur doit fournir un dossier technique incluant le plan de principe du désenfumage, les notes de calcul, les références normatives appliquées et les schémas de raccordement au SSI. Ce dossier est examiné lors du dépôt du permis de construire, en commission de sécurité ou à l’ouverture du site au public.

Intégration au SSI : une coordination indispensable

Le désenfumage est piloté via le SSI de catégorie A, B ou C, selon la classification du bâtiment. Il est généralement asservi à :

• La détection incendie automatique ;
• L’alarme incendie ;
• Les systèmes de compartimentage (volets coupe-feu, clapets) ;
• La coupure de certaines installations techniques (CVC, ascenseurs).

Une mauvaise synchronisation entre ces éléments peut compromettre la mise en sécurité de l’ensemble du bâtiment. C’est pourquoi la formation des concepteurs doit intégrer cette approche systémique, au-delà de la seule technique du désenfumage.

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